Mise à jour des normes, économie de l’eau, recyclage, insectes auxiliaires... Suivant la dynamique néerlandaise, Kenya, Ethiopie, Colombie et Equateur misent désormais sur la durabilité pour maintenir ou accroître leurs parts sur le marché mondial de la rose coupée.
Le 27 février 2019, l’organisation néerlandaise Sustainable Trade Initiative IDH et sa branche florale, la Floriculture Sustainability Initiative adoptaient conjointement l’obligation, pour chacune de leur ferme-membre, de tenir un registre des normes mises en place pour rendre la floriculture moins nocive pour l’environnement. La Floriculture Sustainable Initiative a été impulsée depuis 2013 par les principaux acteurs de la floriculture néerlandaise (importateurs, floriculteurs). Son objectif ? Mettre en place un outil de comparaison entre les différents labels existants afin de rendre la filière florale plus transparente auprès des grossistes et producteurs, mais surtout vis-à-vis des consommateurs. « La pression est énorme pour les producteurs », explique Caroline Legrand, coordonnatrice à FSI. « S’ils souhaitent accroître leur part de marché dans les principaux pays importateurs, ils se rendent compte qu’ils n’ont d’autres choix que de se plier aux standards du marché européen. L’application des bonnes pratiques qu’impose la FSI augmente les dépenses dans un premier temps car les investissements sont importants. Mais c’est une pression positive », insiste-t-elle. Alors, comment les producteurs du Sud peuvent-ils parvenir à s’adapter à ces nouvelles exigences quand beaucoup peinent à rentabiliser leurs investissements ? Prenons le cas de quatre pays producteurs de roses coupées et des initiatives qui y ont été développées pour « redorer » le blason du secteur horticole.
Avec 9% de part de marché en 2015 contre 6% en 2005, les exportations équatoriennes ont connu une ascension fulgurante en l’espace de quelques années (données World Floriculture Map, 2016). La suprématie économique de celui qu’on surnomme « le Pays dans les nuages » s’explique d’abord par ses richesses naturelles. « Les fermes rosicoles sont installées sur les flancs de volcans à 300 mètres d’altitude. Les fleurs profitent ainsi d'un sol fertile car très riche en éléments », explique Lambert van Horen, analyste en Floriculture, Légumes et Fruits à la Rabobank. S’y ajoute la proximité d’un marché puissant et lucratif, les Etats-Unis. « L’Amérique du Sud dominera toujours le marché mondial des fleurs. Tout l’enjeu économique réside dans la rentabilité d’un vol aller-retour. Les avions transportent les fleurs à l’aller. Pour ce qui est du retour, il n’y a aucun problème à remplir un vol Miami-Quito. Mais les vols entre l’Europe et le Kenya (ou l’Ethiopie) sont loin d’être pleins », ajoute l’expert statisticien néerlandais. Pour preuve : après une légère baisse en 2014, la valeur mondiale des exportations des roses coupées équatorienne se consolide à un très haut niveau, atteignant 635 millions de dollars en 2018, ce qui représente 18% de la valeur mondiale des exportations, ex aequo avec le Kenya. L’autre atout du modèle équatorien tient à son positionnement « haut de gamme » misant sur la variété, la recherche et l’adaptation génétique. Un label indépendant national, « Florecuador certified », a été lancé en 2005. Il garantit une gestion efficace des ressources et de l’énergie, l’utilisation raisonnée des pesticides ainsi que la protection des ouvriers horticoles.
Le Kenya a aussi enregistré une croissance impressionnante, en passant de 10% de part de marché en 2010 à près de 15% en 2015. L’Europe constitue plus de 60% des exportations avec, en tête, les Pays-Bas 285 444 000 000 roses), le Royaume Uni (51 085 000) et l’Allemagne (29 911 000) (Eurostat 2017). 500 000 personnes travaillent aujourd’hui dans la floriculture. Conscients de l’importance de leur image de marque face à leurs concurrents, 124 fermes horticoles réunies au sein du Kenya Flower Council, ont adopté un code de bonnes pratiques pour garantir l’exportation de fleurs cultivées de manière responsable tant pour l’environnement que pour les salariés.
Les mesures préférentielles adoptées depuis trente ans ont largement favorisé l’essor de la Colombie en matière de production florale. En 1991, a été adopté le premier Andean Trade Preference Act qui relevait les droits à l’importation sur les biens provenant de Colombie. Longtemps deuxième producteur rosicole, la Colombie a récemment été rattrapée par le ‘lièvre’ équatorien, ce qui l’a contrainte à diversifier sa production vers d’autres types de fleurs comme les œillets et les orchidées (voir schéma ci-joint).
Ses exportations de rose ont ainsi diminué de moitié entre 2010 et 2015, passant de 12% en 2010 à environ 5% en 2015. La Colombie a aussi été l’un des pays pionniers en termes de gestion durable des fermes horticoles : un programme de certification volontaire – Florverde – y a été mis sur pied en 2003. « A peu près 40 % des fleurs exportées par les producteurs colombiens portent notre certificat », expliquait récemment au magazine Vox, Ximena Franco, le directeur de l’association éponyme. « Nous mesurons l'empreinte carbone des fermes et gérons aussi des problématiques comme la contamination, le recyclage, la réutilisation de l’eau, le compostage, etc… ». Cependant, la certification FlorVerde vise uniquement à aider les distributeurs à choisir les productions qu’ils jugent les plus respectueuses de l’environnement ; en aucun cas ce label ne peut-il permettre au consommateur à faire les choix les plus éthiques.
Au total, beaucoup de pays n’ont pas pris pleinement conscience des effets nocifs, tant sociaux qu’environnementaux, de la monoculture de la rose. L’initiative néerlandaise, si elle peut avoir, aux yeux de certains, des relents de néo-colonialisme, pourrait permettre d’avancer sur ces questions. N’hésitez pas à contacter nos experts pour plus d’information sur les moyens de réduire l’impact environnemental de la rosiculture !
Sources :